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EOUARD GANCHE - Le livre de la mort

Edouard Ganche - Le livre de la mort

Édouard Ganche est né en 1880 et décédé en 1945, l’homme était fils d’un médecin de campagne, il fut confronté dès son plus jeune âge à la souffrance d’autrui, à la déchéance physique et à la mort.

Le décès prématuré de ce père dont il espérait suivre les traces le marqua profondément. Il n’avait alors que 12 ans. L’indignation résignée que lui inspirait le lot commun de l’humanité culmina sur le plan littéraire avec ce livre qu’il fit paraître en 1909.

Son livre décrit diverses visions de la mort, en commençant par le récit réaliste d’une autopsie dans les années mille neuf cent. Un voyage dans l’histoire de la médecine légale. Avec moult détails, aussi bien la réalité, que les cauchemars engendrés par cette aventure.

Que dire du récit de cet homme dont le métier est à partir des cadavres de confectionner les squelettes servant aux étudiants de médecine ? On ne peut être plus étonné que de la façon de procéder, Ganche sait décrire les scènes, les rendre pesantes, jouer sur la mort, son attrait, son tabou, sa peur. Maître dans l’art du détail, il nous donne les aspects les plus anodins de la Camarde, comme les plus repoussants.

On y découvre aussi une ballade dans les pompes funèbres du début du vingtième siècle. Comme toute profession, on se rend compte de son évolution, on y voit aussi que la peur, l’appréhension de travailler avec les morts, les idées reçues ont toujours existé, et qu’elles perdurent…

On se rend compte au fils de la lecture, que Ganche a créé des personnages sortis tout droit de son imagination, ou bien il a amplifié les défauts, le charisme, ciselé le caractère, il a arrangé l’histoire à sa façon. En revanche, les décors, les professions sont bien réels, cela se déroulait ainsi.

Ce ne sont pas les personnages qui sont les plus importants, mais la reconstitution d’une vision de la mort à une époque lointaine, c’est l’atmosphère qui vous entraîne tout au long de votre lecture.

Édouard Ganche a dû arrêter ses études de médecine suite à des problèmes de santé. Il se consacra alors pleinement à sa seconde passion, la musique classique, et c’est dans ce domaine qu’il est le plus connu, puisqu’il est officiellement le biographe et musicographe de Frédéric Chopin.

Quelque temps avant de décéder, Édouard Ganche révisa et compléta ce livre, il ambitionnait de le rééditer, dans une version corrigée et enrichie. Celle qu’il appelait « la triomphatrice éternelle » ne lui en laissa pas le temps. Il aura fallu soixante-sept ans pour que son vœu se réalise.

Extrait :

« Prodigieux caravansérails de l’humanité, sépulcrales et noires hôtelleries où logent tous les morts, où logeront tous les hommes, capharnaüms de tous les âges, gisements de toutes les douleurs, bûchers de nos chimères, charniers parés d’illusoires oripeaux, innombrables gouffres où l’on précipite l’interminable cohorte des morts, les cimetières sont embusqués partout. Cimetières des métropoles, vastes et opulentes, extraordinaires et souterraines villes défoncées de petites caves bourrées de cadavres.
L’orgueil du riche lui commande l’inhumation aux nécropoles somptueuses. Vivant, il appréhende de pourrir avec la plèbe, et s’il n’a jamais songé à sa mort, ce ne fut que dans la pensée indicatrice de son tombeau… »

Il a noté la couverture, très « attirante », elle représente le transi de René de Chalons (sculpture de Ligier Richier visible dans l’église Saint-Étienne de Bar-le-Duc), l’un des plus beaux Mémento Mori du XVIe siècle.