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Moyen pratique de conservation des cadavres dans les habitations pendant l'espace de temps qui s'écoule entre la mort et l'enterrement, par M. le Dr ROUNEF (de Toula).




source : Revue illustrée de polytechnique médicale et chirurgicale 30 janvier 1894

L'embaumement est un moyen très coûteux, exigeant la présence du médecin, et est même impossible à la campagne ou dans les villes perdues de province. Le Dr Rounef a expérimenté un procédé simple et pratique pour prévenir la putréfaction cadavérique et le dégagement des gaz putrides qu'exhalent les corps morts dans l'espace de temps qu'ils séjournent dans les habitations, pour l'accomplissement des cérémonies religieuses et autres.

Ce procédé est basé sur les recherches bactériologiques modernes. On sait que la putréfaction cadavérique est provoquée par les micro-organismes qui envahissent le corps après la mort. Les tissus et les humeurs de l'organisme vivant ne contiennent pas de bactéries ; on les trouve dans les cavités naturelles de l'homme vivant. Les voies digestives et respiratoires, les fosses nasales, le vagin, le conduit auditif en sont le siège.

Dans le corps vivant, ces micro-organismes restent inoffensifs : les tissus luttent victorieusement contre leurs tendances nocives. Après la mort, les bactéries ne rencontrent plus de résistance, envahissent l'organisme et produisent les phénomènes de la putréfaction.En désinfectant les cavités naturelles immédiatement après la mort, on peut s’opposer à la putréfaction.

Le procédé de M. Rounef consiste en ceci : Avec une longue aiguille de trocart, semblable à celles de l'appareil aspirateur Dieulafoy, on traverse la paroi thoracique de chaque côté et la paroi abdominale dans la région ombilicale. L'opération peut se faire sans découvrir le cadavre, à travers les vêtements. On enfonce l'aiguille de 10 centimètres et l'on injecte une solution alcoolique d'acide phénique à 10 %, avec un appareil quelconque. De 10 à 20 litres de liquide pour un adulte. Les parois thoraciques et abdominales se dilatent petit à petit ; au bout de quelques injections, on ressent une certaine résistance. L'injection se fait par intervalles. On voit d'abord sortir les gaz par le nez et la bouche ; si l'on force l'injection, le liquide s'écoule par ces orifices. Toute l'opération dure une heure. Au bout d'un jour ou deux, les parois thoraciques et abdominales tombent ; aucun dégagement de gaz ni écoulement ne se produit, même pendant le transport du cadavre.

Le liquide pénètre dans le parenchyme même des poumons, traverse les intestins et pénètre dans le tissu cellulaire. Dans certaines régions, la face et les mains conservent leur coloration ordinaire. Dans les parties externes affectées de plaies, de gangrène, etc., on fait des injections interstitielles.

Ce moyen a permis à l'auteur de conserver pendant huit jours le cadavre d'une vieille femme dans une chambre très chaude. (Wratch, de Saint-Pétersbourg, janvier 1891.)